Le réchauffement des océans n’est pas sans conséquence sur l’état des gaz naturels congelés présents dans les sédiments marins, qui forment le plus grand réservoir de carbone sur Terre. Des chercheurs viennent de mettre en évidence, pour la première fois, un dégazage massif de gisements sur la marge brésilienne, dans l’éventail du Rio Grande.
Ces travaux viennent d’être publiés dans Nature Communications le 29 juillet 2020.
Les hydrates de gaz sont des composés solides d’eau et de gaz, majoritairement du méthane, qui sont stables dans les sédiments marins à plus de 300-600 m de profondeur. Toute augmentation de la température des océans peut avoir un effet sur la stabilité de ces gisements dont une partie est alors libérée sous forme gazeuse. La zone la plus vulnérable aux changements de température est sur la partie supérieure de la pente continentale, où les sédiments contenant des gaz congelés entrent en contact avec les eaux océaniques plus chaudes.
Pour connaitre le niveau de dégazage des gisements, les chercheurs ont étudié la limite supérieure de la zone de stabilité au niveau de l’éventail du Rio Grande. Ils ont analysé un vaste réseau de données géophysiques, géologiques et géochimiques, acquises lors de plusieurs campagnes océanographiques grâce, entre autres, à des robots sous-marins AUV et ROV.
Les chercheurs ont observé dans cette zone, un flux massif de méthane composé de centaines de points d’échappements de gaz qui remontent dans la colonne d’eau. Le flux advectif est trois fois supérieur au flux diffusif, ce que remet en question l’hypothèse selon laquelle le méthane libéré est principalement consommé par l'activité microbienne avant de quitter le fond marin.
Les résultats obtenus mettent en évidence, pour la première fois dans l’hémisphère sud, une déstabilisation des hydrates de gaz consécutive au réchauffement de la température de l’océan dans cette zone. Elle est la preuve d’un déséquilibre thermodynamique entre la bordure de la zone de stabilité observée à partir des données sismiques et l’élévation de la température des eaux profondes compatible avec un réchauffement de l’océan sur plusieurs décennies.
Cette étude a été réalisée dans le cadre du projet brésilien CONEGAS (2010-2020), un partenariat entre l’Université pontificale catholique de Rio Grande do Sul (PUCRS) et Petrobras, et impliquant des collaborateurs en Suède et en France. La collaboration euro-brésilienne a été en partie soutenue par le projet SEAGAS (H2020 grant 656821, 2016-2020), une bourse globale des Actions Marie Skłodowska-Curie entre l’UMR Géoazur et PUCRS.
Couché de soleil dans l’Atlantique sud sur les lieux de recherche au large des côtes de Rio Grande do Sul
Contacts :
João Marcelo Ketzer : Université de Linnaeus, Kalmar, Sweden
marcelo.ketzer@lnu.se
Daniel Praeg UMR Géoazur Université Côte d’Azur (CNRS-OCA-IRD) , France
praeg@geoazur.unice.fr
Contact communication Géoazur:
Corinne Nicolas-Cabane : nicolasc@geoazur.unice.fr
Reference
Ketzer JM, Praeg D, Rodrigues LF, Augustin A, Pivel M, Rahmati-Abkenar M, Miller D, Viana A, Cupertino J (2020). First record of gas hydrate dissociation linked to contemporary ocean warming in the southern hemisphere. Nature Communications,
submitted 04/06/2020. DOI : 10.1038/s41467-020-17289-z PDF